C’est une première dans l’Union européenne que l’État est accusé d

Climat

Des sinistré·es climatiques attaquent l’État en justice

Le 8 avril 2025, des citoyennes et des citoyens directement affectés par les conséquences du changement climatique, accompagné·es par des associations citoyennes et les organisations de l’Affaire du Siècle (Greenpeace France, Oxfam France, Notre Affaire à Tous), lancent un recours en justice contre l’État français pour exiger des solutions concrètes et une protection efficace face aux risques climatiques. 

C’est une première dans l’Union européenne que l’État est accusé de manquer à son obligation de protéger nos droits fondamentaux. Par cette action en justice, ces sinistré·es climatiques exigent que l’État soit contraint de prendre ses responsabilités en matière d’adaptation au changement climatique pour protéger et soutenir l’ensemble de la population, déjà menacée par les conséquences de ce phénomène.

 

La population française déjà exposée au changement climatique

« À chaque fois qu’il pleut, c’est l’angoisse ! Puisque rien n’a changé, on se dit qu’on va à nouveau revivre ce cauchemar… »
Jérôme Sergent, paysan dans le Pas-de-Calais, dont la ferme a été inondée huit fois entre novembre 2023 et mars 2024.

La France subit de plein fouet les conséquences du réchauffement planétaire. Les événements climatiques extrêmes sont de plus en plus fréquents, intenses et coûteux. Rien que pour 2024, le montant des dommages causés par ces catastrophes sur notre territoire s’élèvent à 5 milliards d’euros pour les assureurs.

La population est déjà fortement exposée à ces drames : plus de 60% des Français·es vivent sous la menace de risques climatiques importants. Une personne sur quatre réside dans une zone inondable. Les vagues de chaleur sont de plus en plus fréquentes et mettent en péril notre santé et nos logements. Des millions de maisons sont menacées de se fissurer à cause du phénomène de retrait-gonflement des argiles exacerbé par la sécheresse. Les incendies ravagent des forêts entières et les pertes agricoles se multiplient. L’accès à l’eau potable vient même à manquer dans plusieurs régions.

« Être pauvre à Mayotte, ce n’est pas seulement vivre sous le seuil de pauvreté comme 77 % de la population, c’est aussi travailler dur pour avoir les moyens d’acheter de l’eau potable… mais c’est surtout souffrir de la soif, parce que les rayons sont vides et que nos robinets sont à secs. »
Racha Mousdikoudine, présidente de l’association Mayotte à Soif, qui a subi de nombreuses coupures d’eau potable sur l’île.

Alors que la situation s’aggrave chaque année et que le nombre de sinistré·es climatiques en France continue d’augmenter, l’urgence écologique, elle, disparaît des priorités politiques. Le gouvernement se montre largement défaillant face à cette crise et son troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) est une illustration flagrante de cet échec persistant.

Les mesures qui y sont présentées sont insuffisantes et incohérentes. Elles ne permettent ni de renforcer la résilience de nos territoires, ni de protéger les populations les plus vulnérables. Les personnes précaires, marginalisées et défavorisées subissent pourtant de plein fouet les conséquences de cette crise, alors qu’elles en sont les moins responsables.

Les sinistré·es climatiques qui attaquent l’État en justice

Les sinistré·es climatiques qui attaquent l’État en justice. © Affaire du Siècle

Mettre l’État face à ses obligations

Alors que les assureurs se désengagent des zones les plus vulnérables aux risques climatiques, que les collectivités territoriales peinent à obtenir les financements nécessaires pour faire face à la multiplication des phénomènes extrêmes et que les politiques environnementales reculent sous la pression des lobbies, des forces politiques de droite et d’extrême droite, l’État ne propose pas de vraies solutions pour protéger sa population face aux risques du réchauffement planétaire.

Pourtant, il a l’obligation de protéger nos droits fondamentaux. La Charte de l’environnement, la Convention européenne des droits de l’Homme et la loi européenne sur le climat l’obligent à adopter des mesures concrètes et adaptées pour assurer cette protection face aux risques climatiques. 

Face à ce constat et cette inaction politique, des sinistré·es climatiques, représentant plusieurs régions françaises, accompagné·es par des associations dont celles de l’Affaire du Siècle, ont décidé d’unir leurs forces et de saisir le Conseil d’État. Par cette action judiciaire, ils et elles souhaitent que l’État :

1⃣ soit reconnu responsable de l’insuffisance des politiques d’adaptation actuelles,

2⃣ soit contraint de mettre en place et de financer, à hauteur de plusieurs milliards d’euros par an, des politiques d’adaptation efficaces qui tiennent compte des vulnérabilités et des inégalités sociales et territoriales, notamment dans les territoires ultramarins qui sont les premiers concernés et pourtant largement délaissés.

La justice, un levier puissant pour l’intérêt général

Ce nouveau recours s’inscrit dans une dynamique où la justice française a déjà joué un rôle clé pour imposer à l’État de respecter ses engagements climatiques. l’Affaire du Siècle, soutenue par plus de 2,3 millions de personnes, et le recours de Grande-Synthe ont abouti à des condamnations historiques, entérinant l’illégalité de l’inaction climatique de l’État.

Plus récemment, la suspension du projet autoroutier de l’A69 a démontré, une fois de plus, que la justice pouvait être un levier puissant pour protéger l’intérêt général.

Alors que les politiques environnementales sont de plus en plus attaquées, en France comme dans de nombreux pays dans le monde, ce recours rappelle une vérité essentielle : l’État a la responsabilité de protéger ses citoyens et citoyennes face aux risques climatiques. Et s’il ne prend pas les mesures nécessaires, il engage sa responsabilité devant la justice.

Si vous souhaitez avoir toutes les informations sur cette affaire et suivre les prochaines étapes, rejoignez la mobilisation en vous inscrivant sur le site de l’Affaire du Siècle et suivez leur compte Instagram.