La nouvelle est tombée dans la nuit du dimanche au lundi. le ministre de l’Environnement l’a confirmée : le dernier réacteur allemand sera débranché au plus tard fin 2022. Cette décision de nos voisins a déclenché de nombreuses réactions dans l’hexagone, réactions qui ne font décidément pas honneur à la classe politique française : approximations, erreurs, mauvaise foi, arrogance et une bonne dose d’idéologie, aussi…
Prix de la meilleure contre-vérité : « l’Allemagne dépend des importations françaises » :
Cet argument revient à de nombreuses reprises, comme nous l’a montré Laurence Parisot, qui, interviewée sur RMC & BFMTV déclarait : « Est-ce que l’Allemagne fait ce choix tout en sachant qu’elle va continuer à importer du nucléaire de France ? »
L’Allemagne est, depuis les années 1990, exportatrice nette de courant électrique en direction de la France. Ce n’est pas Greenpeace qui le dit, mais RTE (Réseau de Transport d ‘Électricité) , dans ses rapports annuels. Ainsi en 2010, l’Allemagne a certes importé 9,4 TWh d’électricité nucléaire française, mais elle a exporté en direction de la France 16,1 TWh produits par ses centrales à charbon. Depuis les années 1990, la France est importatrice nette d’électricité provenant des centrales à charbon d’outre-Rhin. Ainsi, pour 2010, le solde des échanges entre la France et l’Allemagne s’élève à 6,7 TWh en faveur de… l’Allemagne !
La source ? le bilan électrique français de 2010, établi par RTE, page 18, à consulter !
Prix du plus fâché avec les chiffres : Eric Besson, ministre de l’industrie
Eric Besson s’arrange avec les données chiffrées : et notamment avec le prix… Contrairement à ce qu’avance le ministre, les Français paient leur électricité 25 % moins cher que la moyenne européenne (source Eurostat), et non 40 %, un chiffre que le ministre emploie quotidiennement mais dont on a pas encore réussi à identifier la source.
Autre chiffre galvaudé, autre notion qui s’écroule : l’indépendance énergétique est devenu un argument massue, qui tient de la tarte à la crème… Le chiffre de 51 %, fréquemment utilisé en France, procède d’un calcul qui ignore le fait que 100 % de l’uranium utilisé dans nos réacteurs est importé de pays comme le Niger ou le Kazakhstan … Dont la France dépend pour faire tourner son industrie nucléaire !
Prix du mensonge climatique : François Fillon, premier ministre
L’argument : le nucléaire n’est pas producteur de CO2 et permets à la France d’atteindre les objectifs de protection du climat… Mais le Premier ministre devrait se pencher sur les données établies par l’Agence internationale de l’énergie : selon les projections de l’AIE (Agence Internationale de l’Énergie), si on parvenait à construire 1 400 réacteurs nucléaires dans le monde d’ici à 2050 (soit un réacteur construit tous les dix jours !), on ne parviendrait à réduire les émissions globales de gaz à effet de serre que de 4 %.
Prix de la confusion : Jean-François Copé
Apparemment, les hésitations des candidats à l’élection présidentielle en 2007 n’ont pas marqué les esprits …
En effet, le secrétaire général de l’UMP déclare : « Le nucléaire, c’est 85 % de notre énergie » voir la vidéo de son intervention sur RTL (à partir de 5m20) . Mais il fait erreur : le nucléaire ne produit pas 85 % de notre énergie mais moins de 80 % de notre électricité, ce qui correspond à 17 % seulement de l’énergie consommée en France…
Le Danemark dès 1985, la Suisse en avril 2011, l’Allemagne cette semaine tous ces pays européens, voisins proches ou plus lointain de la France ont décidé d’abandonner le nucléaire. L’Italie n’a aucun réacteur en activité, le Portugal non plus. Alors oui, contrairement à ce que veulent dire les éléments de langage des responsables politiques français, la France est de plus en plus isolée…