© Greenpeace / Pierre Gleizes
Caen, le 8 mars 2008. Au large de Caen, l’équipage de l’Arctic Sunrise, le navire de Greenpeace, vient d’intercepter un cargo, le Huatuo, en provenance de la République Démocratique du Congo (RDC). Sa coque est maintenant marquée de grosses lettres peintes en blanc : BOIS PILLE. Ce bateau transporte plusieurs centaines de grumes issues du pillage des forêts de RDC. Par cette action, Greenpeace pointe la responsabilité de la France et de l’Europe dans la destruction des forêts africaines. Le commerce de bois est l’un des moins régulés au monde. Greenpeace appelle la France à faire de l’adoption d’une loi qui rende impossible la vente de bois issu du pillage des forêts tropicales une des priorités de sa présidence de l’UE.
« En dépit des déclarations d’intention, la France continue d’accepter le bois issu du pillage des forêts tropicales. Le prix à payer pour le climat, la biodiversité et les hommes est considérable, explique Grégoire Lejonc, chargé de campagne forêt à Greenpeace France. A cause de l’apathie des autorités françaises, tous les consommateurs européens sont ainsi rendus complices de crimes forestiers. C’est tout simplement inacceptable ! »
Le bateau intercepté par l’Arctic Sunrise transporte notamment du bois des sociétés forestières SIFORCO et SODEFOR qui font partie intégrante des multinationales européennes Danzer et Nordsüdtimber. En avril 2007, Greenpeace a publié un rapport accablant, détaillant la façon dont ces sociétés pillent les forêts africaines et dont les opérations forestières destructrices provoquent des conflits sociaux, des dommages environnementaux massifs et d’importantes pertes de revenus pour l’Etat congolais. La France est le 1er importateur européen de bois en provenance de RDC.
La déforestation et la dégradation de forêts contribuent à 20% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit plus que l’ensemble du secteur des transport au niveau mondial. Elles contribuent aussi à la perte de biodiversité et à l’appauvrissement des populations locales. D’après la Banque mondiale, 90% des 1,2 milliards de personnes vivant dans l’extrême pauvreté dépendent directement ou indirectement des forêts pour leur subsistance.
En octobre 2007, le Ministre d’Etat de l’Ecologie, Jean-Louis Borloo a déclaré que la lutte contre la déforestation était sa priorité à l’international. Quelques mois auparavant, en voyage au Gabon, Nicolas Sarkozy avait déclaré publiquement qu’il ne voulait plus que l’« on pille les forêts du Congo ». Lors du Grenelle de l’environnement, le gouvernement français a fait de la lutte contre le commerce illégal du bois et le développement des alternatives à l’exploitation destructrice des forêts, l’une de ses conclusions. Il s’est aussi engagé à promouvoir lors de la présidence française de l’Union Européenne le sujet forêt/biodiversité comme un des piliers des dispositions post-Kyoto. Dans ce cadre, la France soutient activement la mise en place de mécanismes de financement innovants permettant d’éviter la déforestation.
« La Présidence de l’UE est une occasion unique pour la France de tenir les engagements pris lors du Grenelle de l’environnement » ajoute Grégoire Lejonc. La protection des forêts et la lutte contre la déforestation doivent être une priorité de la Présidence française. Il faut notamment que l’UE se dote au plus vite d’une législation pour contrôler la légalité du bois et réduire significativement l’empreinte écologique de ses états membres sur les forêts de la planète. »
560 millions de m3 de produits bois (équivalent bois rond) sont importés par l’UE tous les ans. Près de 23% des produits importés – y compris le papier – sont issus de zones où les activités forestières illégales sont largement répandues. Or, il n’existe aujourd’hui pas de législation qui permette à l’Europe d’empêcher la vente de bois issu de la destruction des forêts tropicales. Le commerce de bois est l’un des moins régulés du monde.
En mai 2003, la commission Européenne a lancé un plan d’action FLEGT (Forest Law Enforcment, Governance and Trade), pour lutter contre l’exploitation forestière illégale et non durable et le commerce de produits bois associés au sein de l’Union Européenne. La suite à donner à ce plan doit être décidé d’ici le mois de mai 2008. Greenpeace appelle les institutions européennes à mettre en place de toute urgence une législation forestière européenne contraignante.